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Meistersinger Abendroth 1943 Reviews and Opinions
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5.0 etoiles sur 5
Quelle vie theâtrale !, 2 juin 2010
Par Pèire Cotó (Occitània) - Voir tous mes commentaires(TOP 100 COMMENTATEURS)
Ce commentaire fait reference à cette edition : Meistersinger Abendroth 1943 (CD)
Certains ne pourraient supporter un enregistrement fait sous le regime nazi, avec les dignitaires du parti aux premiers rangs (voir le site americain). La première reponse possible est que c’est par abus de langage que nous disons qu’un regime, même le plus totalitaire, est inhumain : il n’a pu acceder au pouvoir qu’en manipulant, de façon perverse, des sentiments humains, tels que le besoin de justice, de dignite ou de securite; de fait, la musique de l’epoque ne se reduit pas à l’ideologie de l’epoque, elle reste une production humaine, pas inhumaine, dont nous pourrons juger de l’interêt après l’avoir entendue. La seconde reponse est que si nous n’avions d’autre reproche à adresser à Hitler et à ses acolytes que d’avoir ete de mauvais melomanes, une partie du XXe siècle aurait ete moins tragique; d’ailleurs, l’etaient-ils vraiment en tout Il reste que Hermann Abendroth lui-même a ete membre du parti nazi, ce qui semble curieux quand on sait les reproches de sovietophilie qui lui ont valu d’être renvoye de Cologne; je ne sais pas si la prudence, après cette mesaventure, a pu lui inspirer cette adhesion; et, après tout, est-ce le problème nous ecoutons tant d’autres qui ont eu le même tort. Donc, ecoutons, nous verrons ensuite si nous eprouvons un besoin irrepressible de nous vêtir d’une chemise brune.
Pour Bayreuth en 1943, nous disposons de l’enregistrement de Furtwängler les maitres de nuremberg, plus celèbre, et de celui-ci. Les rôles secondaires, en gros, etaient les mêmes, alors que ceux de Sachs, de Walther, d’Eva, de Beckmesser, de Pogner et de David etaient tenus par des chanteurs differents. Le guide Fayard des operas de Wagner parle de routine à propos de la direction d’Abendroth, disons tout de suite que ça me paraît difficilement comprehensible.
C’est justement la direction qui est le principal atout, toujours vivante, expressive, active à chaque note. Le prelude, souple, optimiste, d’une grande richesse, fait entendre plus que la societe medievale : à la première ecoute, j’ai pense aux bruits de nature qu’on entend chez Mahler, j’ai respire l’air frais de la Franconie medievale et l’imagination n’explique pas tout : il fallait bien que ce Prelude soit plus riche et varie que ceux que j’avais dejà entendus. Le sang-froid caracteristique de l’auteur fait que l’atmosphère d’un passage ne deborde jamais sur celle du passage suivant. Mais puisque le parallèle habituel avec Furtwängler est impose par la date et le lieu, disons que chez ce dernier, le sentiment de noblesse ressenti renvoie à un au-delà des notes, alors que Abendroth se contente d’être où il est, en donnant le maximum de sens aux notes elles-mêmes.
Pour la distribution, elle n’est vraiment ni meilleure ni pire que celle de Furtwängler; après 1965, elle serait extraordinaire. Paul Schoeffler manque un peu de chaleur, de paternelle autorite, mais reste un très bon Sachs; la cinquantaine lui permettra d’obtenir ce qu’il n’a pas encore. Ludwig Suthaus, plus jeune que dans les Furtwängler des annees 50, articule bien, on le sait, mais manque du charme qui convient au rôle (la même annee, Furtwängler avait Max Lorenz, hystrionique, qui en fait trop, mais c’est tout de même autre chose; certains prefèrent Suthaus mais ce n’est pas mon cas). Friedrich Dalberg (Pogner) est lui aussi meilleur que dans les annees 50: il contrôle bien sa ligne de chant mais semble plus patelin qu’autoritaire. Hilde Scheppan, plus tard cantonnee aux seconds rôles, est une bonne Eva, pas inoubliable. Erich Witte, de mauvaise reputation, bien soutenu par le chef, s’en tire excellemment, articule aussi bien que Suthaus mais sans en avoir la lourdeur; certaines fins de phrases montrent pourtant qu’il peine. Lene est correcte sans plus. Mais c’est le Beckmesser d’Erich Kunz qui attire l’attention. On sait la difficulte du rôle : soit on chante, soit on caracterise, et à chaque fois on mecontente les uns ou les autres. Erich Kunz, le charme même, risquait de ne pas caracteriser assez ce personnage antipathique. Il est extraordinaire, montrant l’aigreur, l’envie et la rigidite mentale du Merker, dans les passages qui se rapprochent du parlando, tout en chantant tout le reste comme jamais, mais sans devenir comme d’autres un Walther en plus grave, dissimulant autant que possible son charme par les ruses de son articulation. C’est sans doute l’un des plus grands Beckmesser jamais enregistres.
Il reste que c’est l’orchestre qui passionne, tour à tour lyrique, poetique, bucolique, puissant, menaçant, rythme, anime, saisissant, toujours present et chaleureux, jamais semblable, accelerant et ralentissant sans donner l’impression d’un procede, toujours portant les chanteurs, ce qui permet de comprendre pourquoi la distribution d’Abendroth a la reputation d’être meilleure que celle de Furtwängler. Que de vie ! que de theâtre! L’orchestre donne ainsi une impression de presence que bien des enregistrements plus recents ne procurent jamais, fait passer les 4h 22 sans qu’on s’ennuie ou qu’on fatigue. Le son, excellent pour l’epoque, en paraît nettement plus moderne et, sauf à la rigueur pour les choeurs, fait oublier son âge. A la difference du Furtwängler contemporain, aucune bande ne manque et l’opera est complet.
Je termine en disant mon plaisir de contribuer à faire connaître une interpretation sous-evaluee; on peut n’être pas d’accord, mais je crois avoir justifie mon opinion.
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